Brazza
Il y a quarante ans, un sombre mardi 13 novembre 1962…
L'Aurore titra : " CHARLES SAVORGNAN DE BRAZZA EST MORT DE CHAGRIN A ALGER. La France n'a rien fait pour sauver le musée de son père du vandalisme et de la destruction. "
Quoi d'étonnant à cela quand le même pouvoir ne sauvait même pas les vivants… Ultime avanie pour cette famille dévouée à un pays qui n'était pourtant pas le sien de naissance… mais ces gens en avaient vu d'autres…
Pour ses expéditions, Brazza avait englouti toute sa fortune, et à sa mort, déjà, les siens connurent les pires difficultés. La rente, chichement attribuée par l'Etat, de dévaluation en dévaluation, était devenue insignifiante. Une campagne de presse alerta l'opinion. Alors on permit à sa femme, pour gagner sa vie, d'ouvrir un bureau d tabac. Afin de signer l'engagement à ne pas frauder le fisc…l'Administration, sans pudeur, l'obligea à se déplacer, à ses frais, à Paris… Bien oubliée, l'épitaphe du cimetière Bru : " La France pleura ce fils… " Oubliée l'épopée…

Une épopée qui débuta, en 1869, par une supplique. A 17 ans, il prie l'amiral de Montaignac, ami de la famille, qu'on l'accueille dans la Marine Française. Il s'engage pour la guerre de 70, et après la défaite, demande sa naturalisation. Il est obligé de recommencer à zéro ses études, ses diplômes italiens non valables.
Profitant d'un mouillage de sa frégate au Gabon, en 1874, dans l'embouchure de l'Ogooué, il lance une reconnaissance en territoire mystérieux. Ainsi tout commença… Le gouvernement français sourd à ses demandes, ses sœurs sont obligés de puiser dans leurs économies pour acheter les objets de troc… Et en huit ans, sans un coup de fusil, et par le traité fameux passé avec le roi Makoko, la France gagne 2.500.000 km2 d'empire…
Postes, hôpitaux, amorce d'économie, il organise tout. On veut le faire gouverneur, il refuse et entame, au titre de commissaire général, une lutte contre l'esclavage des Noirs, pratique traditionnelle d'ethnies de la mer rouge. " Nous, la France, ne reconnaissons à personne le droit de retenir un homme en esclavage. Celui qui touche le mât du drapeau, est un homme libre. " Dans le même temps, d'autres puissances européennes se taillaient aussi des empires, mais par d'autres méthodes… Stanley d'Est en Ouest, sema la terreur sur son passage. Brazza comprend alors la cause de coups de feu essuyés sur la rivière Alima : on l'avait pris pour l'anglais… Cependant, il arrive le premier sur le haut Congo. Et pour témoigner son amitié à l'explorateur français, Makoko lui offre un bracelet de cuivre. " Avec lui, partout sur mon territoire tu pourras passer ." Mais sa santé ébranlée, par huit année d'explorations épuisantes, il nomme un sergent sénégalais, Malamine, responsable du poste qui deviendra Brazzaville… et part pour Nice se soigner. Devenu trop gênant pour les intérêt qui se mettent en place sans vergogne, il apprendra dans le Journal Officiel son limogeage du poste de commissaire. Malamine, lui, refusera d'amener les couleurs quand ordre lui fut donné de se retirer… Encore malade, Brazza repartira s'opposer aux abus de l'administration et des sociétés concessionnaires. Et c'est mourrant qu'on le ramène à l'hôpital de Dakar où il s'éteint le 14 septembre1905. Au poignet, il portait le petit bracelet de cuivre, gage d'amitié et de protection, du roi Makoko devant lequel à l'âge de 23 ans, seul, nu-pieds, en haillons, le corps brûlé et fiévreux, il se présenta au nom de la France.
Quelle arme aviez-vous lui demanda Barrès ? " Une canne, je m'étais blessé à la jambe… "

Jean de BREM
Colline Ste-geneviève, près du Panthéon, le 18 avril 1963, un jeune homme de 27 ans tombe sous les balles de policiers parisiens. Pour lui arracher les secrets qu'il venait d'avaler, ils lui percent la gorge sans plus de façon. La presse ne trouva rien à redire.
Etudiant, Jean de BREM avait milité au mouvement des jeunes indépendants. Après une brillante campagne en Algérie, lieutenant parachutiste, il participe à l'opération de Suez. Démobilisé, il entre en journalisme. Convaincu du déclin de notre civilisation, il rejoint l'OAS-Métro dès sa création. Mais déjà il ne voit d'issue que dans l'union étroite des nations européennes.
Plongeant alors sa plume dans la lave de l'histoire du continent blanc, il rédige le " Testament d'un européen ". Il y exprime la force du destin qui est le nôtre, dans une épopée grandiose restée inachevée. Telle quelle, cependant, elle témoigne de talent, de ferveur et d'un souffle prometteur.
Proche, par les convictions et la spiritualité de Jean Bastien-Thiry, Jean de Brem tombe 37 jours après l'exécution de son ami. 37 jours, le temps qui a séparé l'exécution de Brasillach de la mort de Drieu…

Engagé, corps et âme, dans la bataille, il trouve le temps de rendre un dernier hommage à son ami dans un long poème "Fort d'Ivry, à la fraîche" :
(…) Sous la pluie de l'aurore
Ils ont joué aux dés ta tunique bleue d'aviateur
Déchiré ton ruban rouge
Et dispersé tes galons d'argent et d'or au vent de l'histoire
Et ils ont cru, les déments
Que ta mémoire piétinée
Ton souvenir effacé par décret,
Se tairait à jamais la voix d'un homme,
Alors que ta mort tranquille
Nous rendait un dernier service
…(…)
Voltaire ne notait-il pas que " les français n'ont pas la tête épique ".
De toute urgence, s'ils souhaitaient d'aventure l'acquérir, il leur faut ouvrir le " Testament d'un européen ".
Un européen qui donna sa vie pour sauver leur liberté.
Jean MERMOZ

Parmi les plus lumineux de nos héros, il en est un d'une pureté indépassable : Mermoz.
Une figure qu'on devrait se hâter de donner en exemple aux enfants déboussolés de France. Le vent des hélices mène à une ivresse d'une autre qualité que les miasmes des raves-party…
Ecœuré par les intrigues entourant l'agonie de L'Aéropostale (créée par un autre homme d'exception P.G.Latecoere) et conscient des progrès de l'étranger dans l'atlantique sud, Jean Mermoz rejoint les Croix-de-Feux du colonel de la Rocque.

Tout dans ce mouvement est fait pour le séduire : nationalisme traditionnel, christianisme social, camaraderie, respect des héros de 14…
Pareillement, les sources policières de l'époque révèlent un vif courant de sympathie au sein du personnel volant d'Air France.
Mermoz devient la grande figure des Croix-de-Feux, et, le 14 juillet 1935, le colonel de la Rocque tient à sa présence à ses côtés devant la statue de Jeanne d'Arc, place des Pyramides.
De véritables liens d'affection se sont noués entre ces deux hommes qui ont en commun une exigeante éthique du devoir…
En 1936, le Front Populaire gouverne et dissout les Croix-de-Feu. La police, un matin d'octobre, perquisitionne chez Mermoz suite à une instruction ouverte pour " reconstitution de ligue dissoute." Quelques jours auparavant, une confrontation violente avait opposé les militants du colonel de la Rocque aux troupes du parti communiste.
Lors de la fondation du Parti Social Français, Mermoz promu au rang de vice-président déclare : " Je n'ai jamais fait de politique et je n'aime pas cela. Seules les questions sociales me passionnent."
Le 5 décembre 1936, juste avant son départ du Bourget pour Dakar, sa mère surgit, le visage décomposé, tente de le retenir : " Il a encore appelé…Ne pars pas ! "
A six reprises déjà, un mystérieux correspondant lui a téléphoné : " Empêchez votre fils de partir, sinon vous ne le reverrez pas. " Mermoz hausse les épaules : " Ils ne m'ont pas eu jusqu'à présent, ils ne m'auront pas ! "
Le 7 décembre, il quitte Dakar pour Natal à 4h du matin, à bord du Croix du Sud avec Alexandre Pichodou, Jean Lavidalie, Edgar Cruveilher et Henri Ezan, son équipage. Peu après, ils font demi-tour, réparent un problème d'hélice au moteur arrière droit, et repartent. A 10h47 parvient le dernier message : " Coupons moteur arrière droit."
L'archange est entré dans notre panthéon.
Il faut aussi nous rappeler d'un autre homme de cette épopée : le constructeur René Couzinet qui disparaîtra étrangement en 1956 avec son épouse(veuve de Mermoz). Il avait mis au point un engin révolutionnaire à décollage et atterrissage vertical, en forme de soucoupe qui devait faire son premier vol en 1957…nil novi sub sole…


"Jean MERMOZ" Michel MARMIN. Editions Chroniques.

Ernst von SALOMON
" Des drapeaux de fumée noire jalonnaient notre route. Nous avions allumé un bûcher où il n'y avait pas que des objets inanimés qui brûlaient : nos espoirs, nos aspirations y brûlaient aussi, les lois de la bourgeoisie, les valeurs du monde civilisé, tout y brûlait, les derniers vestiges du vocabulaire et de la croyance aux choses et aux idées de ce temps, ce bric-à-brac poussiéreux qui traînait encore dans nos cœurs."

Né en 1902, il entre dés l'age de 12ans à l'école des cadets de Prusse.
Quand survient l'Armistice de novembre 1918, le jeune Ernst alors élève officier, est prit dans le tourbillon des corps francs et participe à la plupart des grands combats de l'après guerre : du Baltikum à la Haute Silésie. Aventurier romantique, il ira jusqu'au bout de l'action.

Impliqué dans l'assassinat du ministre Rathenau en 1922, il sera emprisonné puis gracié suite à une amnistie due à son jeune age au moment des faits reprochés.
Il utilise son emprisonnement à la rédaction des" Réprouvés" ouvrage biographique exceptionnel.
Bien qu'ayant indirectement participé à sa naissance, Ernst von Salomon nourrit une vive répulsion à l'égard du national-socialisme hitlérien et ne participe pas au régime..
L'immédiat après guerre va lui permettre de nous laisser un témoignage teinté d'ironie noire sur l'occupation américaine : " Le questionnaire ".
Rebelle nihiliste, il est un témoin essentiel sur une époque trouble qui a vu de jeunes héroïques se lever contre les marchands et les profiteurs de toutes sortes afin d'accomplir leur destin sans esquisser le moindre regret.

Principaux ouvrages d'Ernst von Salomon:
-Les réprouvés-1930
-Les cadets-1933
-Le questionnaire-1951
-Le destin d'AD-1960

Otto SKORZENY
La légende Skorzeny
12 septembre 1943. Le monde découvre celui que l'on va désormais appeler
"L'homme le plus dangereux d'Europe ". Un audacieux raid de parachutistes vient de libérer le Duce au nez et à la barbe des forces alliées. L'opération aéroportée, qualifiée de " techniquement impossible " est une réussite totale.

Churchill déclarera : " Cette guerre que nous vivons est effarante et stupéfiante. Le coup audacieusement conçu fut magistralement asséné."
Otto Skorzeny, solide gaillard, ancien champion de ski, et adepte de tous les sports à risque, ingénieur, est mobilisé dans la Waffen SS et combat en Yougoslavie et sur le front russe. Il est alors chargé de créer une force spéciale sur le modèle des commandos anglais : la SS Friedenthal.
Plus tard la formation de Skorzeny, après avoir loupé de peu l'enlèvement de Tito, met à l'abri à Budapest le régent Horthy qui allait signer une paix séparée avec les Soviétiques, qui aurait certainement déstabilisé le front allemand bien avant l'heure.
Ses nageurs de combat coulent 30000 tonnes de ravitaillement russe sur le Danube et ce en quelques semaines à la fin de février 1944.
Enfin durant la bataille des Ardennes, il infiltre ses troupes de choc en uniformes américains avec pour objectif les ponts de la Meuse. L'opération échouera d'un rien.
Cette opération lui aurait coûté la vie devant le tribunal de Nuremberg sans l'intervention du commandant F. Yéo. Thomas de l'Intelligence Service qui expliquera avoir employé les mêmes méthodes et finira sa déposition par un étonnant : " Messieurs, le colonel Skorzeny et ses officiers se sont toujours conduits en gentleman pendant la guerre."
Après son évasion d'un camp de dénazification en 1948, l'on croit voir Skorzeny partout. Agent américain, bénéficiaire du fameux " trésor du lac Töplitz", instructeur de l'armée égyptienne ou encore dans les bras d'Evita Péròn, jusqu'à ce que la maladie l'emporte le 7 juillet 1975.


Otto Skorzeny. La guerre inconnue. Albin Michel

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